24 : 11 : 08

réalité de la fiction

Nulle part ailleurs dans Paris humide. Au coin de la bibliothèque de l'Arsenal, lumière noire derrière les travaux, et une affichette pour Gaston Leroux. Mais c'est plus loin qu'il faut montrer chandelle blanche pour monter les escaliers d'une messe sombre. Quelques repris de littérature viennent toucher les pièces du mythe. Une fugitive exposition Lautréamont. Tout doit disparaître à minuit comme Cendrillon. Les Lefrère reçoivent. Jean-Jacques a réussit l'exploit de concevoir un album illustré (chez Flammarion) sur l'auteur le plus fugitif, caché, de la littérature : Isidore Ducasse. Sous le signe de Leroux. Trace après trace.

L'envers de notre temps : des petits signaux pour une oeuvre totale. Au temps des biographies surexposées pour des pensées minimales, voilà un joli guide. Nous, très particuliers, recommençons à penser général. Occupons-nous des affaires du monde. 

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19 : 11 : 08

la confusion des sentiments

Tout s'entrechoque. Pire que Castaneda en vol plané mycologique. Pellaert, encore un disparu anonyme. Discret, modeste, gentil (très gros défaut en France), pour un art du kitsch, de l'excès. Je le mettais en valeur dans Les Sixties en 1996. Il était surpris. Forest aussi : des originaux de leurs dessins dans un musée... Des couvertures de leurs albums en images génériques à admirer, avec Losfeld : Pravda, Barbarella, Jodelle.

D'une façon générale, il doit exister un masochisme inavoué à rester en France. Ce pays humilie, rabaisse, occulte systématiquement ses individualités brillantes, par conservatisme mandarinal ancré, esprit cire-bottes/pas de vagues, poigne de fer de petits potentats médiocres. Seuls le gâtisme ou la mort permettent de transfigurer le végétal désespéré en héros posthume. Certes, trop d'honneurs pourrit, mais trop d'ingratitude systématique use. Pays d'esprits sénescents.

Sinon, pour parler de plus intéressant que cet aveuglement général, le bonheur de découvrir Aline Kominsky Crumb, qui n'est pas juste Madame Crumb. Son livre Need more love. A Graphic Memoir est épatant, comme disait Renoir dans La Règle du jeu, mêlant textes, dessins, photos. Trouvable chez BD Spirit (69 rue Labat, 75018 Paris). Faut connaitre. C'est fait.

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16 : 11 : 08

Caradec passe

En 1956, je naissais et François Caradec publiait une biographie du père de la bande dessinée française : Christophe, préfacée par Raymond Queneau. Comme Noël Arnaud, son ami, François Caradec a toujours eu un goût sûr. C'était quelqu'un, au parcours sans compromission, l'exact envers des pipoles d'aujourd'hui. La télévision l'aura totalement oublié, alors qu'il aurait pu nous conduire musarder chez tant de personnages atypiques. Voilà vraiment le signe de l'échec patent de ce medium. Heureusement, la radio avait un peu ouvert ses micros.

Homme complet, Caradec n'est nullement un génie ombrageux ni un savant obsessionnel. Il est et restera pour ses proches celui qui a su choisir à toutes époques, dans une droite ligne à côté des chemins convenus. Pour moi, et pour longtemps, celui qui vint à la maison avec la merveilleuse Caroline et les Lefrère, pour se réchauffer autour d'un vieux whisky sur la butte, après avoir traversé tout Paris depuis Montsouris. Celui qui déboulait au Musée d'histoire contemporaine, enlevé par Noël et sa bouffarde, après quelques agapes et avant d'autres (et des nuits joyeuses). Caradec me parla aussi longuement chez lui des débuts du Collège de 'Pataphysique et de la pissotière en bas de son immeuble, fleurie et pleurée après son enlèvement.

Je ne pisserai plus sans penser à ce Monsieur occulté.

Post scriptum : un immense gag posthume involontaire, et qui en dit long, du journal Libération illustrant la nécrologie de Caradec par une photo de Noël Arnaud, créditée sur le côté du nom du photographe ayant pris le cliché de Caradec (Noël Arnaud). Tous deux auraient hurlé de rire de cette preuve ultime de l'inculture et de la crétinerie ambiantes. Ce ne serait certes pas arrivé à la nécro de Paris Hilton. Tout est dit.

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11 : 11 : 08

Violence, piège absolu

L'envers du décor. Ouarzazate, studios en plein désert. Jean-Christophe Rufin (qui a participé au Dictionnaire mondial des images) a réfléchi au péril humanitaire, à son instrumentalisation politique. La médecine est en effet à l'origine de la déstabilisation d'un continent entier par explosion démographique : l'Afrique. Il faut donc sûrement corriger. Mais sans intégrisme vert (montré avec Le Parfum d'Adam). Nous avons débattu de tout cela sans fard au Musée international de la Croix rouge à Genève, la semaine dernière (ce fut passionnant). Aujourd'hui, dans l'évolution générale, des économies diversifiées, des micro-marchés, des développements adaptés et le droit à l'isolement doivent préserver et varier nos singularités. Sans néo-colonialisme de la pensée ni violence, qui sert toujours les mêmes.

Dans les sociétés européennes aussi, la violence est un piège récurrent. Depuis le XIXe siècle, les anarchistes ont payé très cher leur romantisme de l'action directe. Comme le pensait Debord, le terrorisme sert toutes les répressions. Quand les libertaires sauront-ils oublier Ravachol ou Mesrine, Bonnot ou Baader ? La lutte des idées et la transformation de la vie n'autorisent jamais de prendre les armes de l'adversaire. Pour combattre ton ennemi, ne le copie pas.

Il reste tant à faire, tant à imaginer pour préserver et transformer ce monde par d'autres voies, que la bêtise --s'il ne s'agit pas d'un montage opportun-- de quelques "anarchistes", "ultra-gauchistes", répugne de connerie stratégique patente. Je me souviendrai toujours de ma rencontre avec Nelson Mandela et de l'incroyable révolution pacifique alors en cours dans son pays. Regarder ailleurs.

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06 : 11 : 08

Obama, homme planétaire

Rabat, lever du jour sur les paraboles. Je reviens d'un tournage sur le Moyen Atlas, le Haut Atlas, jusqu'au désert, en régions berbères. Levé à 4h (5h à Paris), je suis la victoire large d'Obama. Large et Obama, deux paris gagnés facilement. J'écris une analyse sur les symboliques de ce nouvel homme planétaire, justement relatif et qui sait qu'il ne pourra pas tout faire mais décide de mobiliser pour réinventer le futur. Intelligent, brillant : enfin un signal contre la bêtise repue des ignares pipoles ?

En tout cas, au temps d'Internet, l'action individuelle bouge le paysage global. Les Chleuhs sont sur panneaux solaires et paraboles, en haut des montagnes, battus par la neige. Obama sourit et a peur. Saura-t-il parer à l'immédiat en tirant vers la novation ?

L'Afrique fut l'humanité, l'humanité repasse par l'Afrique.

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25 : 10 : 08

ERRO/PICSOU

Erro offre à ma compagne sa sérigraphie de Picsou 2002 ("Hara-Kiri de la banque de Tokyo"). Quel à-propos. C'est toujours un immense plaisir de le retrouver pour une soirée. Je l'ai défendu vers 1980 alors que la figuration narrative était au plus bas, ringardisée comme peinture et peinture politique de plus. Erro s'en foutait heureusement et a continué un travail très important sur notre monde visuel. Aujourd'hui, il est sollicité de toute part. Mais fidèle à quelques personnes comme Gunnar Kvaran à Oslo et Danielle, qui vient d'achever chez Hazan un très bel ouvrage biographique. Une de ses oeuvres va faire la couverture de "Quelle est la place des images en histoire ?" (bilan chez Nouveau monde), comme j'avais choisi un tableau de lui pour l'article "art" du Dictionnaire mondial des images. Périodiquement, il faut se replonger en Erro, l'artiste essentiel et ce sacré bonhomme généreux, avec AAA (admiration, amitié, affection).

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04 : 10 : 08

Monde et Bakounine

Suivant ces collisions mentales que je prise fort, le journal Le Monde daté du vendredi 3 octobre 2008 publiait un article sur l'"écologie culturelle" qui résume différentes réflexions théoriques mises en ligne sur ce site, et j'étais en repérages dans les montagnes sur les traces des utopistes du XIXe siècle entre France (Fourier, Proudhon à Besançon) et Suisse (phalanstère du manège à La Chaux-de-Fonds, hôtel de l'Internationale anti-autoritaire à Saint-Imier...). Ainsi, on m'appelait pour parler d'écologie culturelle, alors que je discutais avec un jeune paysan de Sonvillier, en pleine campagne, au sujet de la petite bâtisse derrière la ferme qui fut le refuge de Bakounine en 1871. Je ne pense pas que tout cela soit sans rapport : il faut, encore et toujours, réinventer le monde.

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12 : 09 : 08

Auto-pub

Voilà la première histoire mondiale des images : des repères pour 14 millions de familles en France, une avancée internationale décisive sur notre bombardement visuel, la fin du cloisonnement des savoirs (peinture ou photo, Inde ou Grèce, cinéma ou architecture...). Alors, pardonnez-moi, mais les histoires de cul des unes et la xième bouillie sur la "peoplisation" de la politique, tout en l'entretenant et en s'invitant entre soi, très très ringard...

L'ouvrage reçoit déjà un accueil très enthousiaste (merci aux réactions sympathiques envoyées de partout). J'en suis heureux. Maintenant, il faut le faire vivre. C'est un combat. La propagation du savoir devient un acte de résistance.

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16 : 08 : 08

cercles entre JO et musique

Il faut organiser des passages dans sa vie, peut-être moins dramatiquement qu'Aragon ou Walter Benjamin. Je reviens du cercle mégalithique d'Almendres au Portugal et tombe dans un 12e arrondissement parisien désert sur une réunion d'amis autour de Pierre Henry pour le dernier de ses concerts chez lui. Ce fut délicieux et pathétique. Quelle belle idée pour ce monsieur fatigué de recevoir dans sa maison-oeuvre, couverte de compositions. Elles ne sont ni d'avant ni d'arrière-garde, elles forment un tout, une grotte d'époque qui me rappelle Royan et Schaeffer, l'ORTF, avec un travail où il flirte avec des appétits sonores divers. Cercle de complicité de vieux baba cools et de jeunes étudiants à l'heure où les JO tentent d'unifier le monde des images collectives et qu'une guerre Russie-Géorgie semble si pathétiquement ringarde. Voilà une nouvelle version de ce que je souhaite, un antidote à toutes les normalisations : l'interprétation (pour le Daily Bul en Belgique) du petit signe "je suis pluriel". Alors, partons vers d'autres cercles, pas fermés, imbriqués.

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22 : 07 : 08

Censure préventive

J'ai eu Siné au téléphone, parce que je suis choqué de son éviction de Charlie-Hebdo. La censure préventive est quand même un signe des temps. Voilà un dessin de 1961, traduit dans une revue allemande, où un para propose de la viande de "musulman", "intellectuel" et "juif", en pleine guerre d'Algérie. Je n'ai pas toujours été d'accord avec Siné dans ses prises de position, mais c'est un grand dessinateur qui a, avec Bosc, lié politique et humour absurde à la fin des années cinquante, en bravant la censure. C'est le vrai père de Charlie. Aujourd'hui, une telle censure préventive vise, sous prétexte d'antisémitisme possible, à laisser attaquer les catholiques ou les musulmans, mais à interdire toute critique de juifs, de la religion juive ou de la politique de l'état d'Israël, quand des Israëliens eux-mêmes sont très sévères et la fameuse "communauté" juive en France constituée de personnes extrêmement variées dans leurs convictions, dont des antireligieux notoires et des anticapitalistes fougueux. Ca sent très mauvais tout cela. Avec deux risques patents : la propagation d'une censure larvée au nom des meilleurs sentiments (la France est bien plus liberticide que les Etats-Unis) dans tous les domaines, religieux ou politiques ; le retour d'un antisémitisme virulent ("Comment ? Les juifs seraient les seuls à ne pas pouvoir être critiqués ?") et la mort connexe de tout humour juif. Au secours Groucho !

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