Sélectionner une trace


Sélectionner une année

2021 • 2020 • 2019 • 2018  
2017 • 2016 • 2015 • 2014  
2013 • 2012 • 2011 • 2010  
2009 • 2008 • 2007 • 2006  
2005 • 2004 • 2003 • 2002  
2001 • 2000 • 1999 • 1998  
1997 • 1996 • 1995 • 1994  
1993 • 1992 • 1991 • 1990  
1989 • 1988 • 1987 • 1986  
1985 • 1984 • 1982 • 1980  
1979 • 1978 • 1977 • 1976  
1975 • 1974 • 1973 • 1972  
1971 • 1967 • 
 

Poubelles 8 et 9
Type de trace : revue
date de parution : décembre 1978

A afficher dans toutes les rues. Voilà ce que je publiais contre la pollution touristique, alors que je quittais un bon salaire à la banque pour un emploi précaire de sous-bibliothécaire vacataire au Musée des Deux Guerres mondiales (aux Invalides à Paris). Mais le monde des musées m'a toujours fasciné. Et les touristes me font vomir. Ils arrivent à détruire les sites les plus fascinants, les populations les plus sereines. Bien sûr, j'abhorre le terrorisme et --faut-il le dire ?-- n'ait jamais touché un touriste. J'abhorre aussi profondément leur bêtise replète de crétins irrascibles, collages intempestifs, meute bêlante, exotique dans l'exotisme créé pour eux.



Aux poubelles de la Gloire 1
Type de trace : Revue
date de parution : mars 1977

Cette revue de 1977, au titre éloquent, était notre rejet punk à nous de l'ambiance délétère des années Giscard (crise, centrales atomiques, train-train après les espoirs post-68). Sous influence pataphysique (le côté volontairement éculé et désuet de la maquette) et situationniste, nous correspondions à la Chaumine (Nogent-sur-Marne) chez Jean-Pierre Hamon, sous les auspices de la Pelforth brune, du Braniff, de Watteau suicidé et des guinguettes. Les anarchistes espagnols de la CNT nous imprimaient à la Ruche ouvrière (rue de Montmorency, dans un Marais d'artisans parisiens), dont nous sortions avec de lourds sacs de clichés typographiques en métal montés sur bois.



Poubelles 4
Type de trace : revue
date de parution : Décembre 1977

Voyages, lectures, fêtes de la chandelle verte, plongée près des volcans, amours des sauvages. Nous rééditions le texte de Jorn sur l'aspect religieux de la pataphysique, lui qui participait à l'IS et au Collège. Nous parlions --je parlais-- de jeu et d'illusion, de n'importe quoi et de théorie. Je dessinais des cérémonies improbables, des apparences. Et je terminais ces bouteilles à la mer qui nous coûtaient cher par : "Tout cela en sorte, cher lecteur et en guise de conclusion à ce rapport qui se voulut sciemment sommaire et grossier, qu'étant bien évidemment le produit de notre époque, nous ne soyons décidément pas de notre temps". Un rejet de tout sauf du plaisir, un refus même de la punkitude et de ses uniformes. Un appel au divers. Je n'ai pas beaucoup changé et confirme mes intuitions de très petit enfant, développées là comme jeune adulte et rabâchées par le grisonnant que je suis devenu.



Poubelles 2 et 3
Type de trace : revue
date de parution : juin 1977

Cette métaphore sanglante du rejet d'une société de la frustration et de l'apparence montrait déjà le refus de toutes les croyances (la "chiennerie gouroumachique") et la mise sur le même pied de tous les totalitarismes (Hitler ou Staline). Ayant lu Voline ou Orwell, je n'ai en effet pas attendu les nouveaux philosophes du 6e arrondissement pour savoir à quoi m'en tenir sur l'URSS et sur les partis communistes. C'est tout de suite que nous essayions de bouger ("la révolution ne peut être que la révolution du plaisir et de la jouissance"), comprenant par ailleurs que l'économie allait unifier le monde (et faire sauter le rideau de fer) : "Le développement économique occidental s'est répandu et a contaminé le globe entier". Mais ces intuitions sont restées confidentielles, dans un temps qui ne pouvait pas les écouter (le clash au salon de la Jeune peinture eut lieu en 1975-76 à cause de la toile de Guy Bodson Totalitarismes égalitaires).



No future
Type de trace : revue
date de parution : Mars 1977

Nous étions une génération de l'après-68. On nous serinait que tout avait été fait et que rien ne pouvait changer. Nous, les libertaires, nous changions déjà notre manière de vivre, crachions sur les saloperies des militants encartés qui justifiaient tout au nom du parti et du grand soir à venir. Nous n'avions aucune illusion sur la fonction mercantile de l'art dans la société. Notre production, c'était notre vie. Nous faisions des petits boulots pour découvrir des moments rares : Brest au petit matin après avoir roulé et bu, comme le Louvre au Pavillon de Flore pour des discussions passionnées devant Goya et des pieds croisés ou Loth et ses filles.



Toulouse-Lautrec (apparence)
Type de trace : Encre de Chine sur papier
date de parution : 1976-77

J'ai beaucoup écrit (articles, roman, réflexions philosophico-politiques), alors que mes études à Sciencepo me permettaient de rencontrer des personnes atypiques (les animateurs du fanzine Falatoff), de passer chez José Artur dans le Pop Club avec Claude Mauriac, de frôler de délicieuses copines, de rencontrer un ami artiste et d'apprendre des méthodes et du droit constitutionnel (que j'aimais beaucoup, contrairement au droit civil fait de "par coeur" sans vraie réflexion). Je me laissais entraîner par mes parents à faire du droit (à Assas, quelle horreur sinistre) pour suivre les cours de l'Ecole du Louvre (trop classique à mon goût alors et où je détonnais en faisant un décryptage sous divers critères de la Baigneuse dite Valpinçon d'Ingres). Puis, je largai tout, parents, famille, études pour travailler dans une librairie, puis une banque et vivre dans une chambre de bonne avec une amie (petit lit, lavabo, réchaud sur table d'écolier, tournedisque à enjamber pour entrer et grandes toiles en cours, mais liberté et beaucoup d'amis). Là, ce brave nabot de Lautrec dessiné pour une chronique d'expo.



'Pataphysicien
Type de trace : Carte de membre
date de parution : 1976

Tout mon salaire de vendeur de journaux en centre commercial est passé à acheter les publications du Collège de 'Pataphysique, dont je devenais membre, après l'avoir côtoyé plusieurs années. Je n'ai jamais été membre d'autre chose que de cette société parodique (celle de Peillet, Queneau, Duchamp, Dubuffet, Miro, Ionesco, Vian...), ayant des amitiés libertaires fidèles et très proche des situationnistes. Je deviendrai aussi un ami  étroit de Noël Arnaud et d'Eva (réalisant même 4 jours d'entretiens filmés avec lui), personnage secret revivifiant avant-guerre Dada avec Les Réverbères, tenant un surréalisme de Résistance dans La Main à plume, ouvrant la voie à Cobra avec le surréalisme révolutionnaire, accompagnant le Collège de 'Pataphysique et Dubuffet ou Boris Vian, conférant avec Debord, soutenant le FLN, futur président de l'Oulipo (Ouvroir de littérature potentielle)...



Exclure le Salon de la Jeune Peinture
Type de trace : Détail d'un panneau avec collages
date de parution : 1976

Joyeux amusements contre la production artistique militante ou commerciale (réévoqués récemment avec Roger Langlais vers l'Himalaya). Voilà un bout de panneau-collage qui m'est resté de notre intervention. J'ai en effet participé au Salon de la Jeune peinture et claqué la porte de l'édition 1976 avec des amis néo-situationnistes (Guy Bodson et Roger Langlais), contestant l'obligation de produire des oeuvres collectives. Pourquoi interdire la subjectivité individuelle ? Nous avons aussi occupé alors les bureaux provisoires du Centre Beaubourg, futur Centre Pompidou, craignant une machine à produire de l'art officiel. La police nous avait relachés. Et, sans hésiter, notre haine à la fois des groupuscules marxisants et des petits artistes vendeurs de leur image de marque, nous fit rejeter en bloc tout le Salon. Texte du tract :

» Considérant l'arbitraire séparation en collectifs du salon de la J.P. ;

» Considérant la surabondance des idéologies qui en découle et de

leur illusoire unification sous le sigle de la jeune Peinture (J.P.) ;

» Considérant l'extravagante prétention de ce conglomérat à

représenter un avant-gardisme révolutionnaire – ce qui au mieux,

ne constituerait qu'une nouvelle couche idéologique – ;

» Considérant les rapports claniques du comité et d'une fraction

au stalinisme dissimulé de la J.P., et l'illusoire opposition de celle-ci

à la misère néo-trotskyste-léniniste, – tous victimes de la fausse

conscience de leur opposition – ;

» Considérant le refus fondamental d'une libre esthétique individuelle

– au pire, la seule qui nous importe encore quelque peu,

les soussignés déclarent se désolidariser dorénavant à compter

de ce jour de toute activité placée sous le sigle “J.P.”

» Paris, le 1er juin 1976

» Pour le collectif 76 : Bodson, Gervereau, Hamon, Langlais. »

Et vlan.



Psychodrame (apparence)
Type de trace : Techniques mixtes
date de parution : 1975

Ma haine du monde réel était totalement influencée par Dada (manifestes de Tzara, Courrier Dada de Raoul Hausmann), par l'Internationale situationniste et Guy Debord (je ferai une exposition sur Asger Jorn), par la musique (Dylan, Stones, Beatles, Velvet, Syd Barrett...) et tout le cinéma en marge (mais j'adorais et adore les années 1920 dans leurs dérapages inventifs : Caligari, Lang, Vertov, Stroheim...) L'activité plastique était pour moi totalement non commerciale, conçue pour des événements et liée à d'autres types d'expressions. Je jouais et réalisais de petits films prétentieux, jusqu'à me voir en grand écran à la Cinémathèque et à être terrorisé.



Incendie
Type de trace : Tract poésie
date de parution : juillet 1975

Incendie. Tout brûler. On partait en 2CV aux frontières marines de la Hollande, dormant sur les sièges, mettant Dylan ou Coltrane à fond. A vrai dire, je ne supportais pas André Breton et son aspect pontifiant, ampoulé. Par amitié, j'ai fait paraître ce texte "surréaliste", alors que je me promenais mentalement avec Kerouac ou Mekas, faisait de la psychogéographie rétrospective aux côtés de l'Internationale lettriste (dont j'appréciais le sens de la dérision, comme Michèle Bernstein) et suivais la dérision d'André Balthazar et du Daily Bul, en allant au carnaval de Binche avant que les touristes japonais n'en polluent l'atmosphère villageoise. Mais pas de secte : les yeux ouverts. Ai-je déjà dit (ou cela fait trop midinette) que je croisais, par exemple, à la galerie Claude Bernard dans ces années, en fin de matinée, un Francis Bacon à la tête de chou, décomposé, en débâcle de banquise, vert et rose suivant les endroits, et bleuet aussi, survivant, me faisant songer qu'il n'y avait évidemment aucun mérite à l'auto-destruction (je déteste particulièrement l'artiste alcoolo-aigre-abruti, clodo de ses ratages) mais qu'une pareille incubation existentielle ne pouvait être foncièrement néfaste. Il bougea. Je ne lui dit rien. Il sortit quelques mots techniques à l'assistante, blême et rèche, désagréable, et finit par croiser mon regard pour une torsion minimale de la commissure gauche de la lèvre. Cette connivence nous suffit. Je partais, heureux.



1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | 11 | 12 | 13 | 14 | 15 | 16 | 17 | 18 | 19 | 20 | 21 | 22 | 23 | 24